tag:blogger.com,1999:blog-6308376813534457538.post6553112370013902103..comments2021-07-18T20:10:53.471+01:00Comments on Projet Open-Village: Education et pauvreté (I)Ahmed Benabadjihttp://www.blogger.com/profile/01784451438832345146noreply@blogger.comBlogger7125tag:blogger.com,1999:blog-6308376813534457538.post-85742521857100324422015-09-14T20:33:52.501+01:002015-09-14T20:33:52.501+01:00Merci Robert pour ton long (et juste) commentaire!...Merci Robert pour ton long (et juste) commentaire! Je voulais répondre à Sonia et finalement ton texte me donne l'occasion de faire d'une pierre deux coups. <br />Tout d'abord, sur la rationalité. Celle dont je parle c'est bien la rationalité "calculante", celle qui passe par une réduction mathématique du réel. C'est cette rationalité, celle de Descartes ou de Newton, qui dévalorise le réel au profit de modèles numériques dont je dis qu'elle projette une signification imaginaire sociale très précise qui est d'ailleurs au centre de notre civilisation occidentale moderne et technicienne (l'homme maître et possesseur de la nature, tout dans le cosmos est compréhensible pour l'homme moyennant les bons outils théoriques et rien n'est hors de sa portée pour autant qu'il y mette les moyens...). Avec cet imaginaire social, on aboutit presque naturellement à l'idée que le progrès technique infini est la source du bonheur et que la libre et illimitée consommation des objets est la marque de notre élection (par Dieu ou par la sélection naturelle, cela dépend de quel bord on se place). <br /><br />Il existe bien sûr d'autres rationalités théoriques ou pratiques qui sont traditionnellement transmises par les communautés rurales et donc en partie enseignables à l'école (moyennant sans doute quelques aménagements mais, je suis d'accord avec toi et avec Sonia, rien qui ne semble insurmontable puisque certaines pédagogies semblent y réussir). C'est d'ailleurs ce que j'appelle moi aussi de mes voeux. Une petite remarque pourtant pour bien insister sur un point fondamental pour moi: il n'y a pas d'éducation en dehors de la communauté dans laquelle on se trouve. Il peut seulement y avoir de l'enseignement (de techniques, de savoir faire, de savoir théoriques). Et l'école n'a jamais formé des paysans: ce sont les communautés paysannes, les lignées de paysans qui génèrent en leur sein ceux qui sauront faire produire la terre dans le respect d'un équilibre social et d'un écosystème donnés. Couper le lien entre la communauté et l'écolier (soit par les programmes et donc l'imaginaire social qu'on véhicule à l'école soit par le simple "arrachement" géographique que l'obligation d'aller à l'école impose parfois) peut donc être très déstabilisant pour des communautés déjà fragilisées par la pauvreté, la concurrence des villes, les aléas et les changements climatiques...<br /><br />Sur le reste, finalement après t'avoir relu, j'ai peu à ajouter puisque je suis entièrement d'accord avec toi. Le but de notre projet est très exactement celui que tu décris d'ailleurs, l'apport de connaissances pouvant se faire entre les villages que nous rencontrerons ou, plus tard, avec les communautés que nous espérons agréger au sein du site open-village.Ahmed Benabadjihttps://www.blogger.com/profile/01784451438832345146noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-6308376813534457538.post-9879725602232456502015-09-14T16:33:54.665+01:002015-09-14T16:33:54.665+01:00Seconde partie de ma réponse :
Or, dans la signif...Seconde partie de ma réponse :<br /><br />Or, dans la signification imaginaire sociale (je reprends ce concept très pertinent que tu empruntes à Castoriadis) produite par l'école, il y a présentement l'idée que l'homme est un être social qui vit en milieu urbain sauf lorsqu'il ne peut faire autrement. Lorsque j'étais enfant, nos « leçons de choses » évoquaient la vie en milieu rural, mais, déjà alors, on y sentait une touche d'exotisme ; ce que nous apprenions alors semblerait aujourd'hui le comble de la ringardise. Et je crois très fortement – je te rejoins complètement sur ce point – que ce recentrage urbain se rattache en toute simplicité à un arrière-plan idéologique plus ou moins bien dissimulé mais omniprésent (y compris dans les Pays en développement) : celui du consumérisme. Consommation et développement demeurent aujourd'hui étroitement associés, d'où le fantasme de fuir le village pour pouvoir consommer mieux et davantage. Grande erreur collective, immensément répandue. Erreur, d'abord, car le village, même pauvre, même éloigné, même difficilement accessible, n'est plus systématiquement tenu en marge de la modernité. On développe en Afrique des programmes de suivi de la santé à partir d'applications fonctionnant sur téléphones portables, ce qui montre bien… que les zones concernées sont couvertes par les réseaux de téléphonie mobile et que les habitants sont équipés. Erreur aussi de penser que les zones rurales sont des « cas désespérés », qu'elles ne peuvent bénéficier d'un apport qualitatif – grâce à l'intégration intelligente de leurs traditions et de connaissances appropriées véhiculées par les systèmes d'enseignement – leur permettant d'assurer aux habitants des conditions de vie semblables ou supérieures à celles qu'ils pourraient trouver en milieu urbain. Je crois justement que l'un des mérites de votre projet sera de bien démontrer qu'il existe des modes de vie non urbains propres à apporter aux hommes et aux femmes, de manière durable, une existence de qualité et un réel bien-être. Et que, pour ce faire, un judicieux apport de connaissances constitue un « plus » indéniable.RobertFhttps://www.blogger.com/profile/00370923363337200745noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-6308376813534457538.post-76710523678649336042015-09-14T16:33:03.378+01:002015-09-14T16:33:03.378+01:00Quel magnifique article, Ahmed. Tu nous précipites...Quel magnifique article, Ahmed. Tu nous précipites dans le débat, presque à notre corps défendant, tant ce que tu dis est stimulant. Pour ma part, je ne suis pas sûr que le coeur de l'affaire soit la rationalité de l'école – au demeurant, j'ai une grande interrogation philosophique personnelle sur la notion même de raison humaine et sa pertinence dans la recherche de la compréhension du monde ; mais ceci est une autre discussion, hors du sujet pour aujourd'hui, elle nous mènerait un peu trop loin mais je te propose d'en reparler un jour autour d'un bon verre de prosecco, quand tu reviendras nous voir à Rome.<br /><br />Prenons le terme « rationalité » au sens où tu l'entends. En quoi cette rationalité serait-elle uniquement théorique ? En quoi ne s'appliquerait-elle pas à la vie dans un village ? En quoi, surtout, les outils dont elle dote les élèves seraient-ils inadéquats pour améliorer la vie dans un village ? Comme le dit mon illustre fils, il faut en finir avec l'opposition du travail manuel et du travail intellectuel. Toute filière scolaire digne de ce nom devrait systématiquement marier et associer ces deux dimensions. Des compétences acquises à l'école (peut-être pas tout à fait l'école telle qu'elle est, mais telle qu'elle pourrait assez facilement devenir) seraient extrêmement utiles pour favoriser un développement harmonieux dans des villages ou des communautés rurales. Je me souviens qu'il y a trois ou quatre ans, les Nations Unies avaient annoncé que, désormais, plus de la moitié de la population de la planète vivait en milieu urbain. Ce basculement symbolique est issu d'une tendance « lourde » depuis fort longtemps déjà, et plus personne de nos jours n'avait considéré qu'il procédait d'une évolution vers l'émancipation. Le phénomène de ghettoïsation des abords des villes, que tu mentionnes, est devenu aujourd'hui très problématique, partout, et quasiment personne ne semble concevoir la manière dont on pourrait inverser le processus.RobertFhttps://www.blogger.com/profile/00370923363337200745noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-6308376813534457538.post-8900670726061976342015-09-14T16:32:17.859+01:002015-09-14T16:32:17.859+01:00Ahmed, ton "post" m'a fait réfléchir...Ahmed, ton "post" m'a fait réfléchir et je viens de t'écrire une réponse... apparemment trop longue (plus de 4096 caractères). Je vais donc essayer de la couper en deux.RobertFhttps://www.blogger.com/profile/00370923363337200745noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-6308376813534457538.post-71018100326219524212015-09-12T19:45:16.414+01:002015-09-12T19:45:16.414+01:00Est-ce que le débat doit vraiment être autour de l...Est-ce que le débat doit vraiment être autour de l'école, ou plutôt autour du fait que l'école secondaire et l'université sont trop souvent loin du village natal, qu'il faut quitter ce village pour y aller, qu'il y a une pression et un aura autour de ces études qui amèneront une vie soi-disant "meilleure"... et que le contenu enseigné est trop souvent inadapté à développer l'individu de façon holistique. Je pense que ce sont des débats différents. L'idéologie fausse d'une vie "meilleure" ailleurs, et la façon dont l'éducation est faite. Car l'éducation peut être faite différemment (Steiner, Montessori, Freinet, etc. - ou celle d'une éducation très "concrète" telle que décrite dans le monde utopique de "Woman on the Edge of Time" de Marge Piercy) et alors être un lieu d'ouverture, d'épanouissement. Si elle est faite ainsi, et reste locale, et n'arbore pas le mythe de "vie meilleure ailleurs", je pense que l'éducation a sa place, et nourrit l'individu. SoniaBnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-6308376813534457538.post-84970211048361561842015-09-12T18:10:08.076+01:002015-09-12T18:10:08.076+01:00Je crois que ce grand malentendu provient du fait ...Je crois que ce grand malentendu provient du fait que notre modèle occidental a mis la rationalisation au centre de sa vision du monde. C'est à dire que ne vaut que ce qui est mesurable, démontrable, optimisable. Rien de tout cela avec le travail manuel: on sait très bien combien de crêpes on peut théoriquement faire avec une douzaine d'œufs, on a du mal à calculer le gout de ces crêpes ou optimiser le plaisir du cuisinier à les faire. Dis autrement l'école projette une vision du monde dans laquelle la sensation, la créativité, le plaisir sont absents. Elle ne parle qu'à une moitié de nous (la partie intellectuelle, théorisante, calculatrice) laissant l'autre totalement à l'abandon.<br />Dans le cas d'Enampore c'est encore pire: l'école détruit la base même de l'économie locale (la riziculture) en retirant année après année les jeunes bras qui sont nécessaires à l'autosuffisance alimentaire de la collectivité. En faisant cela, on ne fait pas que créer des handicapés de la sensation ou de la créativité, on tue purement et simplement des communautés. Et c'est bien plus grave.Ahmed Benabadjihttps://www.blogger.com/profile/01784451438832345146noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-6308376813534457538.post-90378938846414015852015-09-12T12:37:26.035+01:002015-09-12T12:37:26.035+01:00Nous y voilà, le vif du sujet ! Ahmed, tu es mon h...Nous y voilà, le vif du sujet ! Ahmed, tu es mon héros !! Vraie réflexion sur ce sujet bien délicat. L'école et le travail manuel...pourquoi toujours les mette en opposition, quelle richesse quand les deux vont ensemble !Flohttps://www.blogger.com/profile/14393925003296242229noreply@blogger.com